La Russie en guerre
Bien que pays le plus peuplé d'Europe, la Russie sait que la mobilisation de toutes ses forces ne pourra pas s'effectuer en moins d'un mois compte tenu de l'immensité du territoire et des moyens de transport limités dont elle dispose.
Au déclenchement de la guerre, l'armée d'active est forte de plus de 1,4 million d'hommes et il faut compter avec plus de 3 millions de réservistes. Ces effectifs vont considérablement augmenter pour arriver à un total de plus de 14 millions de mobilisés entre août 1914 et janvier 1917. Au moment de la première révolution (février/mars 1917), 7 millions d'hommes sont sur le front et 2,5 millions en réserve mais les pertes sont à la mesure des masses engagées avec déjà près de 1,8 million de tués et 3,2 millions de blessés ou prisonniers.
Front européen:
C'est là que l'armée russe va mener l'essentiel de ses combats.
1914
L'État-Major russe est dirigé par le grand duc Nicolas Nicolaievitch. L'Allemagne fait d'abord porter son effort sur le front occidental pour mettre rapidement hors de combat l'armée française. La bataille des frontières tournant rapidement au profit de l'Allemagne, le gouvernement et l'État-Major français pressent leur allié russe d'intervenir rapidement. À la mi-août, 3 armées russes passent à l'offensive, pénètrent en Prusse orientale, obligeant le Grand État-Major allemand à retirer 2 corps d'armée du front occidental pour faire face au danger. En outre, le vieux général Hindenburg est tiré de sa retraite pour prendre en charge, assisté du général Ludendorff, la défense du territoire allemand. Ces derniers vont très vite rétablir la situation en infligeant deux sévères défaites à l'armée russe: à Tannenberg d'abord, le 30 août, aux lac Mazures ensuite, les 8 et 9 septembre.
En revanche, l'offensive menée par les Russes en Galicie contre les forces austro-hongroises est couronnée de succès puisqu'ils occupent l'essentiel de cette province au mois de décembre.
A la fin de l'année 1914, le front se stabilise le long d'une ligne de 1200 km. Malgré un nombre impressionnant de tués et de prisonniers ainsi que la perte de la majeure partie de la Pologne, les troupes russes restent menaçantes.
1915
Considérant que la supériorité de son matériel et les nouvelles conditions de guerre lui permettent de tenir le front occidental avec des effectifs réduits, le nouveau chef d'État-Major allemand, Falkenhayn, y prélève des troupes pour forcer la décision à l'Est.
Entre février et fin septembre, date à laquelle le front se stabilise à nouveau, les forces austro-allemandes lancent une série d'offensives qui malmènent durement les forces russes obligées à leur tour de demander aux Alliés de les soulager en passant à l'offensive sur le front occidental (Artois, Champagne).
A la fin de l'année, les pertes russes sont considérables, tant humaines (150 000 tués, près de 700 000 blessés et 900 000 prisonniers) que territoriales (Pologne, Lituanie et Galicie). Le tsar Nicolas II, assisté du général Alexeiev, prend en charge le commandement de l'armée russe qu'il retire au grand duc Nicolas. Cependant, bien que durement touchée, la Russie ne demande pas à signer une paix séparée comme l'espéraient les Allemands.
1916
Malgré les attaques allemande sur Verdun et autrichienne sur le plateau d'Asiago, en Italie, les Alliés maintiennent leur idée d'offensive générale sur les deux fronts.
Sur le front oriental, le général Broussilov mène une offensive victorieuse en Galicie entre juin et la mi-août, infligeant de lourdes pertes aux forces austro-allemandes obligées de retirer des troupes à l'Ouest pour redresser la situation.
Pourtant, fin décembre 1916, la situation va se dégrader sur le plan politique, les difficultés de ravitaillement dans les villes et la lassitude entraînant des manifestations populaires.
1917-1918
Début mars, les manifestations de Pétrograd se transforment en révolution: le tsar abdique et un gouvernement provisoire le remplace. Même s'il s'engage à poursuivre la guerre, il est miné par la propagande des Soviets tandis que, dans l'armée, le moral s'effondre et les désertions commencent à se multiplier. Broussilov qui a remplacé Alexeiev lance une offensive en été mais des divisions refusent de monter en ligne et des régiments se débandent. Début septembre, l'offensive austro-allemande accélère l'effondrement de l'armée russe et, en novembre, la prise du pouvoir par les bolcheviks entraîne l'abandon de la guerre par la Russie (paix de Brest-Litovsk en mars 1918).
Les Russes ont également combattu sur d'autres fronts, même si c'est de façon plus marginale:
Front du Caucase:
Il met aux prises, dès la fin de l'année 1914, les troupes russes et turques dans des conditions extrêmement difficiles. La lourde défaite qu'y subiront les Turcs au début de l'année 1915 serait à l'origine des massacres perpétrés contre les Arméniens.
Front de Salonique (Armée d'Orient):
La Russie y envoie une division en 1916. Elle est désarmée en 1917 à la suite de troubles consécutifs aux évènements révolutionnaires qui secouent le pays. Les éléments les plus durs sont expédiés en Afrique du Nord tandis que les éléments restés fidèles forment une Légion Russe rattachée à la Division Marocaine.
Front Occidental (France):
C'est en 1916 que le tsar Nicolas II accepte la création d'un corps expéditionnaire russe composé de 4 brigades. Deux d'entre elles, les 1ère et 3ème Brigades Spéciales (soit 4 régiments, c'est à dire environ 20 000 hommes et un peu plus de 350 officiers) débarquent en France entre le printemps et l'été 1916. Elles sont affectées au front de Champagne où elles subiront de lourdes pertes.
En avril 1917, les évènements de Russie trouvent un prolongement en France, les agitateurs multipliant les incidents au sein de la 1ère Brigade (recrutement moscovite et ouvrier). Les troupes russes sont donc retirées du front et expédiées à la mi-juin au camp de la Courtine. N'y sont enfermés que les éléments les plus durs (environ 10 000 hommes, essentiellement de la 1ère Brigade), car environ 6000 hommes restent fidèles au gouvernement Kerenski et sont mis à l'écart des "révolutionnaires". Associés à des troupes françaises, ils participeront à la répression de la mutinerie qui éclatera au sein du camp durant l'été 1917.
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